Charlie et les autres
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Le 7 janvier 2015 à 12h52, @jachimroncin publie sur Twitter une image qu’il a réalisée en hommage à la rédaction de Charlie Hebdo, où douze personnes viennent d’être assassinées. On y lit, en lettres blanches et grises sur fond noir dans une typographie inspirée du logo de l’hebdomadaire les mots JE SUIS CHARLIE. Dès 12h59, le message commence à circuler sur Internet accompagné du hashtag #jesuischarlie. […] Cette combinaison du slogan, du visuel et du mot-clé constitue un cas remarquable de viralité numérique, en termes d’étendue géographique et de vitesse de propagation. Mais sa dynamique, tant technique que symbolique, en fait surtout un phénomène médiologique exemplaire, qui dépasse de loin ses enjeux strictement médiatiques. C’est la première fois dans l’histoire qu’un mouvement d’opinion de grande ampleur, allant jusqu’à rassembler près de 4 millions de personnes dans la rue, adopte comme bannière une image et une devise issues de Twitter. On peut y lire le signe d’un basculement consommé de la société dans l’hypersphère. Quand bien même le nombre d’utilisateurs actifs sur la plateforme est encore très inférieur à celui des téléspectateurs ou des lecteurs de PQR, le rapport de force entre les sphères médiatiques s’est, sinon inversé, du moins rééquilibré : les “grands médias” sont de plus en plus contraints de suivre le web, et un hashtag peut désormais voyager bien au-delà de la plateforme et même de l’Internet, jusque dans la rue. En bref, il n’est plus besoin d’être sur Twitter pour que nos actions ou nos représentations soient en partie influencées par ce qui se passe sur Twitter…
À paraître dans Médium N°43, Charlie et les autres (avril 2015)
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Pour citer cet article
Louise Merzeau “#jesuischarlie, ou le médium identité”, Médium, Charlie et les autres, N°43, 2015/2, p. 36-46.